Les actions sont-elles trop chères ?
 

Depuis plusieurs semaines, les marchés marquent une pause. La tendance reste positive grâce aux bonnes perspectives des entreprises mais le retour de l’inflation est une incertitude importante. Pour l'instant les marchés gardent leur calme et continuent à parier sur l’avenir, mais sont-ils trop optimistes ?

Valoriser les actions


Pour valoriser les actions, nous pouvons comparer leur rentabilité attendue à celle d'un placement au taux sans risque. Nous obtenons ainsi la « prime de risque » qui est un indicateur assez fiable de la cherté des marchés.

Un investisseur en actions américaines capitalise aujourd’hui à un taux de 4,50%, contre un taux sans risque à 1,50%. Il bénéficie donc d’une prime de risque de 3%. Nous voyons donc que les marchés ne sont pas particulièrement chers car ils offrent un surplus de rentabilité encore significatif, entre 3% et 5,6% selon les zones géographiques.

Ces perspectives sont-elles crédibles ?

Maintenant que nous avons une idée assez précise de la capacité bénéficiaire des entreprises, il nous faut évaluer la probabilité que ce scénario se réalise. Ces bénéfices attendus seront-ils plus forts ou plus faibles ? et quelle visibilité avons-nous sur leur pérennité ?

 

Pour répondre à ces questions, il faut évaluer la dynamique des trois agents clés de l’économie que sont les ménages, les entreprises et les États.

Tout d’abord, les ménages. L’importance du soutien des pouvoirs publics leur a permis de traverser la crise sans difficulté majeure, en tout cas rien de comparable aux conséquences de la crise de 2009. Des emplois ont été perdus, mais les chèques de compensation offerts par les gouvernements ont bien fonctionné. D’ailleurs, la lenteur avec laquelle les travailleurs américains reprennent le chemin du travail atteste de leur solidité financière. Bon nombre de secteurs peinent en effet à embaucher, faute de candidats. De plus, la frugalité forcée pendant la période de confinement devrait conduire à un boom de consommation en sortie de crise. Les ménages devraient donc être un facteur très positif pour les mois à venir.

En second lieu, les entreprises. Elles ont souffert de la pandémie, mais bon nombre de faillites ont été évitées. La nouvelle donne géopolitique avec l’affrontement entre les Etats-Unis et la Chine promet des rapatriements de capacités productives. De plus, l’offre très importante d’innovations technologiques pour améliorer la productivité, les plans de relance ambitieux des gouvernements, la dynamique liée à la transition écologique et les taux d’intérêt toujours très bas sont autant de facteurs de visibilité qui devraient permettre aux entreprises d’investir massivement dans l’avenir.

 

Enfin, les pouvoirs publics. Bon nombre de verrous budgétaires ont sauté pendant cette crise sanitaire. L’urgence de la transition écologique, le besoin souveraineté dans la production et les prochaines échéances électorales (mi-mandat aux Etats-Unis, élections générales en Allemagne, en France et en Italie) sont autant de facteurs qui rendent peu probables un retour à une politique d’austérité. Nous sommes probablement à l’orée d’une nouvelle ère en matière de doctrine budgétaire, ce qui est très encourageant pour les investisseurs en actions.
 

La grande inconnue de l’inflation


Nous le voyons donc, les économies profitent de vents porteurs très puissants. Mais la principale inconnue de cette nouvelle donne est l’inflation. En effet, la situation actuelle est marquée par une abondance monétaire historique. Est-elle excessive ? C’est difficile à dire. Et les principales écoles économiques s’affrontent sur ce sujet. Mais ce qui est certain, c’est qu’une envolée de l’inflation contraindrait les banques centrales à remonter les taux, ce qui réduirait mécaniquement la valorisation des actions (afin de respecter une prime de risque acceptable).

 

Ce scénario n’est cependant pas le plus probable, car le monde occidental est encore structurellement déflationniste. De plus, les banques centrales ont été très claires sur le sujet et sont prêtes à accepter une certaine inflation avant d’agir. Cela fait des années qu’elles cherchent à créer de l’inflation. Une période de plusieurs mois d’inflation soutenue ne devrait donc pas les inquiéter outre mesure.


Conclusion


Cette analyse nous montre donc que les niveaux de valorisation actuels des actions sont justifiés et qu’ils ne sont pas si élevés, compte tenu des perspectives. Mais il convient de rappeler deux règles fondamentales pour profiter de cette rentabilité attractive des actions. 

La première, c’est d’investir sur le long terme. La rentabilité des actions n’est pas garantie chaque année. Ce taux se réalise généralement sur une période supérieure à 5 ans. Il faut donc investir par tranche et avec régularité, afin de lisser la volatilité des marchés.

 

La seconde, c’est d’être « investi sur les gagnants » comme nous le rappelle régulièrement Henrik Muhle, notre gérant d’Acatis. En effet, pour capitaliser sur les actions, il faut profiter du phénomène de la « destruction créatrice », par lequel des industries en déclin sont remplacées par de nouvelles activités économiques.


C’est pour cette raison que nous privilégions la gestion dite de « croissance » dans nos sélections de gérants. Car les vainqueurs de demain sont ceux qui feront la performance des portefeuilles.

 

 

Philippe Lefebvre 16 juin. 2021